Axes de recherche


Marge regroupe des chercheur.se.s travaillant sur les littératures francophone, hispanophone et russophone, et des spécialistes en sciences de l’information et de la communication. L’équipe entend articuler des recherches très spécialisées à des dynamiques transversales, qui émergent et continueront d’émerger à l’occasion des séminaires d’équipes et de projets permettant d’assembler des compétences autour de problématiques communes.

Les axes dont on trouvera la présentation ci-dessous n’ont rien d’hermétique, et les projets sont nombreux, qui font se croiser ces axes de recherche, un membre de l’équipe pouvant évidemment, selon ses travaux, circuler d’un axe à l’autre. Ils indiquent simplement la délimitation de champs de recherche privilégiés au sein de l’équipe, parfois depuis de nombreuses années.

Axe 1 : Poétique

Responsable : Benoît AUCLERC

 
Depuis le commencement de ses activités, l’équipe Marge travaille à interroger les questions de poétique, comme en témoignent les colloques et les livres l’Ut pictura poesis selon Yves Bonnefoy (Farhad Ostovani et le livre, Kimé, 2008), sur Le Haïku en France (Kimé, 2010), sur les Politiques de Ponge (Revue des Sciences Humaines, 2014), ou sur les relations entre Poésie et histoire (colloque de l’automne 2018). La réflexion se porte ainsi sur des poétiques particulières en les articulant à des réflexions de poétique générales, envisagées sur un temps long, qui s’étend de la fin du XVIIIe siècle aux productions de l’extrême contemporain. Sont notamment organisés dans cette perspective :
  • le séminaire bisannuel « La Fabrique pongienne », organisé depuis 2016 en partenariat avec le Labex OBVIL (Paris-Sorbonne), dont on peut retrouver les captations vidéo, et qui fait l’objet d’une publication en revue (Cahiers Francis Ponge).
  • Le cycle de rencontres « Écrivains présents », occasion de faire se confronter les réflexions critiques et théoriques aux pratiques d’écriture actuelles.
Outre ces manifestations régulières, les recherches s’orientent dans les directions suivantes :
  • Les relations ambivalentes et contradictoires que la poésie entretient avec la technique, que ce rapport soit de distance ou de résistance, ou que, en un retour critique, il s’agisse d’interroger les présupposés mêmes de la poésie à partir de ces transformations : on s’interrogera donc sur les redéfinitions du fait poétique à partir de la diversité de ses supports et de ses manifestations (colloque sur Pennequin, poète, performeur et vidéaste, à l’automne 2020 ; réflexions sur les métamorphoses du livre de poésie au XXIe siècle).
  • Les modalités de présence du poétique dans l’espace public (espace intellectuel, géographique, social et politique). On s’intéressera notamment dans cette perspective aux relations souvent méconnues et négligées entre poésies expérimentales et cultures populaires.
  • La poétique de la traduction et des transferts culturels. Deux programmes de recherche se rattachent à ce sous-axe : le séminaire « L’espace littéraire de Berlin à Vladivostok » (co-organisé avec l’ENS de Lyon et les Universités Lyon 2 et Grenoble), ainsi qu’un cycle sur l’auto-traduction, conduit en collaboration avec des équipes des universités Paris-Sorbonne et de Nice.

Axe 2 : Poétiques numériques

Responsable : Alice Pantel-Cassagnaud

 
Forte d’une activité régulière et riche centrée sur l’appréhension des nouvelles textualités numériques, l’équipe MARGE – et en particulier ses membres qui s’intéressent aux productions littéraires de l’extrême contemporain, ainsi que ceux qui s’occupent de questions liées au traitement et à l’archivage des œuvres – a pris la décision de bâtir un programme de recherche spécifique qui porte sur la production littéraire nativement numérique. Les travaux de cet axe s’inscrivent également dans le cadre du projet Lifranum, financé par l’ANR. Ce programme de recherche souhaite proposer une progression scientifique, dont les étapes seront les suivantes :
  1. Identification des productions nativement numériques. Le programme “Cartographie du Web littéraire francophone”, actuellement en cours, s’inscrit dans cette nécessité première de repérage et d’indexation des contenus. Ces opérations nécessitent une réflexion épistémologique initiale indispensable, sur la notion de littérarité des productions identifiées, ou sur le statut de l’amateur, de l’auteur, de la création et de la réception. Cette étape a débuté depuis le mois d’octobre 2018, avec la collaboration de la BNF et d’autres équipes de recherche de la région, en particulier dans le domaine informatique.
  2. Construction de corpus destinés à une communauté de chercheurs en construction. Il s’agit pour nous de mettre à disposition (c’est l’un des objectifs du projet LIFRANUM, soumis à l’ANR) les résultats de nos enquêtes, afin de contribuer à l’institutionnalisation d’une littérature numérique entendue comme ensemble des productions littéraires créées par et pour Internet, sur sites, blogs, forums et réseaux sociaux. Nous comptons également contribuer à la construction d’une communauté de chercheurs, à échelle internationale, qui trouvera là une source documentaire stabilisée.
  3. Production d’outils herméneutiques adaptés à l’analyse de ces créations littéraires, plurisémiotiques, intermédiales, et ancrées dans un écosystème spécifique. Les acquis de la poétique classique doivent en effet être soumis à un nouvel examen, dans le but d’adapter des catégories critiques existantes et de forger, si besoin, de nouveaux outils afin d’actualiser, à tous les niveaux, les techniques d’analyse ou de commentaire d’un texte littéraire.
  4. Restitution à une communauté élargie. L’objectif de cet axe est de contribuer à une utilisation pédagogiquement innovante des productions littéraires nativement numériques qui ne se réduirait pas à une communauté restreinte de chercheurs initiés. Des publics variés (étudiants, enseignants et élèves du secondaire, usagers et professionnels des bibliothèques) sont en effet directement visés par le projet LIFRANUM notamment, ou les travaux engagés autour de la “LittéraTube”. L’expertise acquise sera proposée aux encadrants afin de convertir la familiarité de ces publics avec Internet en une activité pédagogique orientée vers une nouvelle littératie.

Axe 3 : Pratiques médiatiques et industries culturelles

Responsables : Catherine Dessinges et Lucien Perticoz

 
Cet axe entend élargir les perspectives de recherche et affirmer le positionnement interdisciplinaire de Marge. Afin de répondre à cet objectif ambitieux, trois directions de recherche sont appréhendées en articulation étroite et interrogées dans un même cadre d’analyse :
  1. Les formes de la création de textes. La notion de « textes » est ici entendue au sens large du terme et englobe tout à la fois les productions littéraires, audiovisuelles, musicales, vidéoludiques, etc. Il s’agira d’interroger la profusion des productions issues des industries culturelles mais également les formes de créations amateures que le numérique favoriserait en contribuant notamment à l’émergence de nouveaux régimes de visibilité.
  2. Les pratiques de réception / consommation par leurs publics (lecteurs, visionneurs, auditeurs, gamers, contributeurs, etc.) Cette diversité de productions s’accompagne d’une diversification et d’une complexification des pratiques des publics. Cette tendance nous amène notamment à interroger les éventuelles porosités entre auteurs (professionnels ou amateurs) et publics, ainsi que la créativité des braconnages tactiques à l’œuvre.
  3. Leurs modes de production / diffusion / valorisation au sein des industries culturelles. Les stratégies éditoriales et de diffusion, ainsi que les acteurs eux-mêmes, ont connu des profondes mutations avec l’arrivée du numérique, participant dès lors des évolutions repérées au niveau des types de textes et des pratiques qui s’y rapportent. Les acteurs et nouveaux acteurs des industries culturelles et du numérique sont ainsi partie prenante des mutations à l’œuvre et se doivent de repenser leurs stratégies, dans un contexte socio-culturel et socio-économique en pleine reconfiguration.
La porosité des frontières permise par Internet et le numérique nous amène à interroger des objets qui se situent aux marges et frontières de la création. Ils sont appréhendés du point de vue des nouvelles formes d’écritures qu’ils engagent, des types d’interactivité qu’ils suscitent, mais également de la variété des interactions engendrées autour de l’œuvre et la diversité des acteurs qui la font exister. La rencontre entre un récit et un media (numérique ou non) nous permet donc de nourrir nos échanges et réflexions sous l’angle d’approches plurielles conjuguant narratologie, poétique, sémiotique, esthétique, sémantique, sociologie de la réception et des pratiques ainsi que la socio-économie des médias.

Axe 4 : Littérature et histoire

Responsable : Cyril Francès

 
Cet axe pérenne de l’équipe fait évoluer son champ d’analyse pour la période 2020-2025 : l’étude des rapports entre récit historique et écriture du « moi », c’est-à-dire de la manière dont les écrits du for privé (mémoires, autobiographies, journaux, correspondances...) rendent compte d’une expérience singulière de l’histoire, conserve un rôle central, mais notre programme de recherche entend élargir ses perspectives en ouvrant trois nouveaux champs de réflexion :
  1. Le premier s’intéresse à des formes d’écriture hybride qui s’inscrivent aux confins du récit historique et de la littérature et, par là, interrogent leurs prétentions heuristiques respectives. L’éventail est large, allant des faux-mémoires d’Ancien Régime aux récits documentaires contemporains, des œuvres qui jouent de la circulation et de l’amalgame des procédés de la fiction et de l’histoire, soit pour fabriquer des leurres et obscurcir le partage entre vrai et faux, soit au contraire pour enrichir le récit historique d’un surcroît de sens par le biais de l’écriture littéraire. Dans tous les cas, l’ambiguïté de ces textes leur permet de jouer des impensés au cœur des pratiques ou des poétiques de leur temps, historiennes autant que littéraires. Un colloque en 2020-2021 permettra d’établir un premier état des lieux de la question.
  2. Le second porte sur la manière singulière dont les auteurs écrivent l’histoire. Il s’agit d’aborder les textes historiques avec les instruments de l’analyse littéraire pour, d’une part, mettre au jour les enjeux esthétiques, politiques et historiographiques propres aux œuvres historiques, souvent négligées, d’auteurs pour la plupart canoniques (Voltaire, Chamfort, Mme de Staël, Lamartine...). Mais, d’autre part, la démarche nous conduira à soumettre les textes d’historiens, y compris contemporains (Duby, Certeau., ...), à l’analyse littéraire afin de dégager les éléments de leur éventuelle poétique et de s’interroger sur les enjeux de la littérarité à l’œuvre dans l’écriture théorique et la discursivité scientifique. Ce projet de recherche devrait déboucher sur un séminaire en forme d’atelier de lecture/analyse de textes, où les questions théoriques et épistémologiques liées à l’articulation littérature/histoire seraient systématiquement abordées à partir de « cas » concrets.
  3. Enfin, dans l’optique de prolonger au sein de cet axe le dialogue interdisciplinaire entre les membres de l’équipe, un troisième champ de réflexion se proposera d’interroger les formes « d’enregistrement » de l’histoire et la manière dont elles sont le vecteur d’une action politique concrète : des libellés et journaux de la Révolution française aux vidéos et photos captées et immédiatement diffusées sur internet par les manifestants lors des luttes politiques les plus récentes en passant par les images et affiches qui ont accompagné les grands bouleversements du XIXe siècle, le déroulement des évènements historiques n’est jamais indépendant des récits qui en sont faits ou des images qui en sont données par ceux qui en sont les acteurs, au travers des formes de représentations fragmentaires, discontinues mais souvent animées d’une puissante énergie poétique ou plastique : c’est la fonction politique et le rôle historique de ces formes, en lien avec leurs propriétés esthétiques, qui feront l’objet de notre réflexion.

Axe 5 : Santé

Responsable : Fabienne Boissieras

 
L’axe Santé (adossé à l’axe de recherche “Santé globale” de l’Université Lyon 3) a pour ambition de développer les collaborations interdisciplinaires entre des domaines considérés souvent comme peu compatibles. La thématique de la santé, de la santé mentale, intéresse de plus en plus les recherches croisées ; et les nombreux appels à projets mobilisant des savoirs médicaux et des savoirs en sciences humaines en témoignent. L’ouvrage L’Énigme de la mémoire (Cnrs Éditions, 2019) a pu montrer l’intérêt suscité par des réflexions menées sur les pathologies du cerveau et parce qu’elle apparaît comme un fléau sanitaire, sur la maladie d’Alzheimer. L’objectif pour les années à venir est de prolonger les recherches articulant santé et littérature (narratologie, poétique, sémiotique), existence du trouble et parti-pris stylistique, en mobilisant des chercheurs et des doctorants, curieux de cette prise en charge par la littérature de sujets sur la santé.

Les projets qui s’inscrivent dans la continuation de cette recherche plurielle sont construits ou en cours de construction :
  • projet international et pluridisciplinaire intitulé « né sous X : la question de la filiation ».
  • « La diagnose : l’éloquence du corps malade » : littérature, médecine (séminaire en cours de construction).
  • « Santé mentale et espaces numériques : l’indécis des supports et des topiques » (colloque, 2021)